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SUR UN THÉORÈME DE GÉOMÉTRIE SPHÉRIQUE: THÉODOSE, MÉNÉLAÜS, IBN ʿIRĀQ ET IBN HŪD

Published online by Cambridge University Press:  26 August 2010

ROSHDI RASHED
Affiliation:
Centre d’histoire des sciences et des philosophies arabes et médiévales, CNRS – Université Paris-Diderot, UMR 7219,5 rue Thomas Mann, Bâtiment Condorcet, Case 7093, 75205 Paris Cedex 13 Email: rashed@paris7.jussieu.fr
MOHAMAD AL-HOUJAIRI
Affiliation:
Université libanaise, Faculté de Génie, CNRS-Liban, rue al-Arz, al-Koubbé, Tripoli, Liban Email: houjairi@hotmail.com

Abstract

In his encyclopedic book (al-Istikmāl), the mathematician of Saragossa, Ibn Hūd (d. 1085/478 H.), established by an intrinsic demonstration of spherical geometry, a remarkable theorem which generalizes the proposition III.11 from Theodosius’s Spherics and integrates the propositions III.23-25 from Menelaus’s Spherics. In this paper, we study this theorem and the demonstration of Ibn Hūd. The reader will find also some established and translated texts (Ibn Hūd, Ibn ʿIrāq, al-Ṭūsī) addressing the same theme.

Résumé

Dans son livre encyclopédique (al-Istikmāl), le mathématicien de Saragosse, Ibn Hūd (mort en 1085/478 H.), établit par une démonstration intrinsèque de la géométrie sphérique un théorème remarquable qui généralise la proposition III.11 des Sphériques de Théodose et intègre les propositions III.23-25 des Sphériques de Ménélaüs. Dans cet article, on étudie ce théorème ainsi que la démonstration d’Ibn Hūd. Le lecteur trouvera aussi établis et traduits quelques textes (Ibn Hūd, Ibn ʿIrāq, al-Ṭūsī) qui portent sur le même thème.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Cambridge University Press 2010

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References

1 Debarnot, M.-Th., “Trigonometria”, dans Storia della Scienza, vol. III, Istituto della Enciclopedia Italiana (Rome, 2002), pp. 432447Google Scholar . Al-Bīrūnī, , Kitāb Maqālīd ʿilm al-hayʾa, La Trigonométrie sphérique chez les Arabes de l’Est à la fin du Xe siècle, édition et traduction par Debarnot, M.-Th. (Damas, 1985)Google Scholar .

2 Rashed, R., Les mathématiques infinitésimales du IXe au XIe siècle, vol. V, Géométrie sphérique et astronomie (Londres, 2006)Google Scholar .

3 Mort en 1085 (478 H.). Sur la vie et les écrits d’Ibn Hūd, voir Rashed, R., Les mathématiques infinitésimales du IXe au XIe siècle (Londres, 1996), vol. I, p. 976Google Scholar ; Al-Houjairi, M., L’Encyclopédie d’Ibn Hūd, thèse doctorale (Univ. Paris 7, 2005), vol. I, pp. 354356Google Scholar ; Hogendijk, J. P., “The geometrical parts of the Istikmāl of Yūsuf al-Muʾtaman ben Hūd (11th century). An analytical table of contents”, Archives internationales d’histoire des sciences, 41 (1991): 207281Google Scholar . Dans son livre l'Istikmāl, Ibn Hūd consacre deux chapitres à la géométrie sphérique. Il expose un plan de recherche ultérieur; il y décrit une classification des objets sphériques abordés; et il écrit:

“ la seconde espèce de la quatrième espèce sur les propriétés des sphères et des sections qui y sont engendrées sans que les unes soient rapportées aux autres. Elle se partage en deux chapitres: le premier porte sur les propriétés des cercles situés dans la sphère sans que les uns soient rapportés aux autres, le second sur les propriétés des cercles des sphères, de leurs arcs et de leurs cordes rapportés les uns aux autres” (MS Copenhague, Bibliothèque Royale, Or. 82, fol. 76v).

Nous avons constaté la perte d’une grande partie du premier chapitre; or sa restauration pose un problème sérieux et difficile à résoudre de façon univoque, car toute restauration possible suppose l’adoption d’une conjecture probable. Les commentaires marginaux du manuscrit, qui auraient pu aider au processus de restauration, sont contradictoires – il semble qu’ils soient tardifs (voir Al-Houjairi, L’Encyclopédie d’Ibn Hūd, vol. I, pp. 48–51). Quant au deuxième chapitre, il semble qu’il y ait deux paragraphes perdus ainsi qu’une partie du troisième paragraphe. On note que la perte a déjà été signalée par J. P. Hogendijk (op. cit.).

4 Dans le commentaire mathématique qui suit, en apportant au texte la rectification minimale nécessaire, nous reproduisons la démarche de l’auteur en utilisant parfois des notations et des conceptions mathématiques modernes, afin de rendre l’enchaînement logique accessible. Nous allons, tout au long de notre étude, comparer le texte d’Ibn Hūd avec Les Éléments d’Euclide (Les Œuvres d’Euclide, trad. F. Peyrard [Paris, 1993]), Les Sphériques de Théodose de Tripoli (107–43 avant J.-C.) (trad. Paul Ver Eecke [Paris, 1959]), Les Sphériques de Ménélaüs (milieu du Ier siècle après J.-C.) (Max Krause, “Die Sphärik von Menelaos aus Alexandrien in der verbesserung von Abū Naṣr Manṣūr b. ʿAlī b. ʿIrāq”, Abhandlungen der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, phil.-hist. Klasse, 3, 17 [1936]: 1–116) et parfois avec quelques opuscules du livre de Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī (mort en 1274), intitulé: Taḥrīr Kitāb al-Ukar li-Thāwdhūsīyūs (Rédaction des Sphériques de Théodose).

5 Les Sphériques de Théodose, trad. Ver Eecke, pp. 111–12.

6 Nous avons eu recours aux abréviations suivantes: drt (angle droit); angle(A) (l’angle A); extr(A) (l’angle extérieur au sommet A); arc(AB) (l’arc AB); arc(C) (circonférence du cercle (C)); cercle(AB) (cercle construit sur l’arc AB); crd(AB) (corde de l’arc AB); sgm(AB) (segment de droite AB); long(a) (longueur du segment ou bien de l’arc a); plan(C) (plan du cercle (C)); hom(AB) (homologue de l’arc AB: hom(AB) = crd[2 arc(AB)] = 2 Sin(AB) = 2 R sin(AB), où R est le rayon du cercle); hem(A) (l’hémisphère de sommet A); tr (triangle); sect (secteur); aire(F) (l’aire de la figure F).

7 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, pp. 97–8:

Voir l’énoncé de cette proposition reprise plus tard par Ibn Hūd (MS Copenhague, Or. 82, fol. 89r ); voir également infra la note 28.

8 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, pp. 101–3 et pp. 105–6; MS Leiden, Or. 930, fols. 50v–51r.

9 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, pp. 103–5 et pp. 106–10.

10 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, p. 104, 1–3; MS Leiden, Or. 930, fol. 54r:

Le texte d’al-Ṭūsī portant sur Ménélaüs et Ibn ʿIrāq justifie la correction suggérée (voir le Commentaire des Sphériques de Ménélaüs de Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī (Taḥrīr Kitāb Mānālāwis fī al-ashkāl al-kuriyya [Hyderabad, 1359 H.], p. 131).

11 MS Copenhague, Or. 82, fol. 89r–90v (voir infra le texte manuscrit et la traduction de cette proposition).

12 Dans ce cas CΣ.

13 Voir Les Sphériques d’Ibn Hūd (MS Copenhague, Or. 82, fol. 77r): “Les cercles passant par les pôles d’un cercle de la sphère, le coupent en deux moitiés et à angles droits”.13 donc sgm(GK) ⊥ plan(C 1), car la droite GK est l’intersection de deux plans perpendiculaires à plan(C 1);

14 Les Éléments d’Euclide, XI.19, pp. 412–13.

15 Ibid., définition 3, p. 396.

16 Voir la note 13.

17 Voir infra le lemme d’Ibn Qurra cité par al-Ṭūsī ainsi que celui d’Ibn ʿIrāq.

18 Dans tout triangle sphérique ABC:

(voir Les Sphériques d’Ibn Hūd, MS Copenhague, Or. 82, fol. 79r).

19 Voir la note 18.

20 Ibn Hūd ne justifie ni l’existence ni l’unicité des points D et P; il semble que c’était un résultat bien connu dans la théorie des sections coniques, d’après les propriétés de l’hyperbole équilatère (Apollonius, Les Coniques, II.12). En effet, la démarche d’Ibn Hūd équivaut à déterminer deux points comme intersection d’une branche d’une hyperbole équilatère d’équation xy = d dΔ avec deux droites d’équations respectives x = dU et x = dGdU, dG ∈ [dΔ, d].

21 Ici, il faut considérer 3 cas possibles: soit P est entre U et G, soit il est entre U et D, soit PU. Les preuves des 3 cas sont similaires; mais Ibn Hūd, dans sa démonstration, néglige les 2 derniers cas et traite seulement le premier cas; il suppose donc implicitement que le point P est entre U et G, de telle manière qu’il répète l’erreur commise par Ménélaüs dans la proposition III.25 de ses Sphériques, erreur dénoncée par Ibn ʿIrāq, comme nous avons déjà mentionné. Nous nous limiterons au traitement du premier cas, les autres sont analogues.

22 Le problème, ici, nécessite la résolution d’un système d’équations de la forme:

.

23 Car d · dΔ = dG · dD.

24 Ibn Hūd ne justifie pas ce passage, qui équivaut à dire que la fonction sin x/x est décroissante sur l’intervalle ]0, π/2[. Voir les travaux d’Ibn al-Haytham relatifs à cette question dans Rashed, Les mathématiques infinitésimales, vol. V, p. 51.

25 Soit M un point courant de arc(). Posons

L’abscisse curviligne s = ξ du point P qui vérifie la condition: hom(EP) / d = hom() / hom(EP), est un point de maximum global de g(s) sur l’intervalle ]0, Rπ/2[. Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī nomme ce point: le point médian (al-mutawassiṭa); voir son Commentaire des Sphériques de Ménélaüs, éd. Hyderabad, p. 141.

26 Remarquons que ξ = R arccos[cos α / (1 + cos α)]1/2 = R arctg(1 / cosα)1/2, (α∈]0, π/2[ ), est le point de maximum global, sur l’intervalle ]0, /2[, de la fonction g(s) = s – f(s) qui exprime l’excès: arc(BM) arc(B ), M(s) ∈ arc(). Donc la valeur de ξ détermine sur l’arc le point Mξ = M(ξ), nommé médian (al-mutawassiṭa) par Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī (note 25). Lorsque l’angle α varie entre 0 et π/2, le point Mξ décrit sur la sphère une courbe d’équation paramétrique:

Cette courbe est gauche (elle est de torsion non identiquement nulle).

27 Pour établir cette équivalence, il suffit d’utiliser la relation cos α = RΔ/R.

28 Dans cette proposition reprise par Ibn Hūd, on considère, dans une sphère (S) de diamètre d et de centre O, un grand cercle (C 1) de pôles G et G′ et on désigne par (C 2) un autre grand cercle oblique sur (C 1) et de pôle F. On marque sur la circonférence de (C 2), deux points D et E qui ne sont pas diamétralement opposés. On trace les demi-circonférences arc(GDG′) et arc(GEG′) qui coupent arc(C 1), respectivement, aux points C et H. On désigne, par B et B′ les points d’intersection de arc(C 1) et arc(C2), par A le point d’intersection de cercle(FGG′) avec arc(C 2), qui est situé sur hem(G), et par dA, dD et dE les diamètres des cercles qui passent, respectivement, par les points A, D et E et qui sont parallèles à (C 1) (voir MS Copenhague, Or. 82, fol. 89r). Sous les conditions considérées, on démontre que hom(HC) / hom(DE) = (d dA) / (dD dE).

Fig. 9.1.

Dans la situation décrite, nous avons, à un isomorphisme près, 4 différentes configurations possibles; la figure 9.1 représente l’une de ces configurations (voir Al-Houjairi, L’Encyclopédie d’Ibn Hūd, vol. I, pp. 31012).

Notons qu’Ibn ʿIrāq utilise dans son texte le terme Sinus (jayb), tandis qu’Ibn Hūd utilise le terme homologue (naẓīr), c’est-à-dire le double du Sinus.

29 Il suffit de vérifier l’inégalité sin a > 2a/π, (a ∈ ]0, π/2[).

30 Les Sphériques de Théodose, proposition III.11, pp. 111–15.

31 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, pp. 99–100.

32 Ibid., pp. 104–5.

33 Notons que le raisonnement en géométrie extrinsèque requiert le calcul des axes auxiliaires, et donc un lemme ou plusieurs selon les cas, alors que le raisonnement en géométrie intrinsèque s’effectue à l’aide des formules obtenues à partir d’une sous-variété dans l’espace et n’exige plus de tels lemmes. Notons également qu’un autre mathématicien, Ibn Yūnus, a recours à des méthodes de géométrie intrinsèque dans ses Tables Hakémites (rédigées au début du XIe siècle).

34 Ce texte a été établi à partir du MS Jordanie, Bibliothèque privée, fols. 61v–62v (noté J) et MS Londres, British Library, ADD 23570, fols. 59–60 (noté B).

35 Les Sphériques de Théodose-Ṭūsī; MS British Library 23570, fols. 59–60.

36 Les Sphériques de Théodose-Ṭūsī, MS British Library 23570, fol. 60.

1 Œuvres d’Archimède, traduction française F. Peyrard (Paris, 1807), p. 355.

2 Les Sphériques de Ménélaüs-Ibn ʿIrāq, éd. Krause, pp. 99, 18–100, 4; MS Leiden 930, fols. 51v–52r (noté L).

3 Ibid., pp. 100, 5–101, 25; MS Leiden 930, fol. 52r–v.

4 Voir le lemme précédent.

5 MS Copenhague, Or. 82, fols. 89r–90v.